Bonjour Philippe, tu es auteur de plusieurs romans, peux tu te
présenter à nos lecteurs ?
Bonjour
Scribe, je suis un vieux con, adolescent attardé et fan de metal
depuis le début des 80s. J’ai écrit six romans, en comptant La
Forme du Désespoir, mais celui-ci est le premier qui se déroule
dans un univers metal. Les autres livres n’évoquent pas, ou très
peu, la musique. Ce sont des policiers, presque fantastiques, moins
aboutis que LFDD, je trouve.
Comment en es-tu venu à écrire ?
J’ai
rapidement eu envie de créer mon univers narratif. J’ai fait
plusieurs essais infructueux, j’écrivais quelques lignes et
abandonnais tout de suite. Ce n’est que vers trente ans, à la fin
de la grossesse de ma femme -quand les soirées devenaient un peu
longues…- que j’ai enfin réussi à coucher plus que deux ou
trois lignes sur du papier.
Des auteurs qui t'ont influencé ?
Oh
oui. Gustav Meyrink, un écrivain pragois dont les œuvres sont des
monuments. J’en citerai trois, Le Golem, L’Ange à la Fenêtre
d’Occident et Le Visage Vert. Fred Vargas, également. J’adore
son style et son univers. Plus récemment, j’ai découvert
Murakami. Si j’avais du talent littéraire, j’aimerais écrire
comme lui. Poétique, mystérieux, génial.
Le roman. Peux tu nous dire les difficultés que tu rencontres en
phase d'écriture dans ce type d'ouvrages ?
Mon
grand problème, c’est mon impatience. Je suis trop pressé de
raconter les choses, et voudrais finir avant d’avoir commencé.
Heureusement, j’ai croisé la route de Belzaran, un auteur de BD
que je recommande chaudement. Certainement l’une des personnes qui
aime le moins au monde ce que je fais… mais qui a le chic pour
émettre des critiques constructives. Sous sa houlette, je crois que
j’arrive à mieux structurer mon récit, à savoir prendre le temps
de raconter des choses. Son empreinte se fait ressentir sur La Forme
du Désespoir, mais elle devrait être encore plus nette sur le
prochain roman,
Arrêtons nous si tu le veux bien sur ton dernier roman, la
forme du désespoir (voir ma chronique ICI) .
Qu'est ce qui t'a donné l'idée de ce livre ?
Mes
cinq premiers romans avaient pour cadre des univers presque
totalement fictifs. J’ai eu envie de changer et de parler de moi.
J’adore parler de moi, tu sais, et notamment des périodes de ma
vie qui m’ont profondément marqué. L’une d’entre elles est
mes trois années en école d’ingénieur, à Paris. J’y ai
rencontré des personnes marquantes, et certaines d’entre elles
m’ont ouvert les portes d’un metal encore plus captivant que
celui que j’écoutais alors – Hail to you, MkM ! J’ai
ressenti le besoin d’évoquer cette période. Simplement, si je
m’étais contenté d’évoquer ma vie d’alors, les lecteurs
seraient morts d’ennui. Je ne voulais pas avoir ça sur ma
conscience, alors j’ai inventé une histoire…
Ton histoire sonne vraie, y'a t'il des éléments autobiographiques
et/ou biographiques dans le livre ?
Oui.
Comme je disais précédemment, j’ai vécu dans l’univers décrit
dans le livre. Ecole d’ingénieur, concerts, soirées dans des
cadres non standards, … c’était ma vie. Simplement, Alex, le
protagoniste, vit des aventures autrement plus trépidantes… Autre
différence majeure : Alex n’aime pas le thrash, moi si. C’est
important.
Parlons musique, puisque ce roman tourne autour d'un album du groupe
de Gothic/Funeral Doom Shape Of Despair Angels
of Distress : pourquoi
ce disque en particulier ?
J’ai
vécu dans l’univers que je décris au début des années
90,
bien avant la naissance de Shape of Despair, groupe que j’ai
découvert tard. Simplement, Angels of Distress contient un titre
qui résume à lui seul tout l’essence du gothic doom, toute la
« nostalgie d’une époque qui n’a jamais existé »
-je reprends l’expression de Tabris, chroniqueuse du webzine Les
Eternels, où j’agite également ma plume. Il s’agit de « Night’s
Dew », un instrumental pas bien long, mais d’une puissance
évocatrice infinie. Il me fallait utiliser ce joyau, quitte à
déplacer l’histoire dans le temps.
Tes goûts musicaux ?
Relativement
éclectique, mais je ne fais pas exprès, je le jure. Doom,
goth, indus, black, thrash, trip hop, retro wave, new wave, dark
ambient.
Si
je devais citer quelques groupes, Shape of Despair mis à part, ça
serait très long. On
va dire Emperor, The Moon Lay Hidden Beneath A Cloud, Bathory, Virgin
Black, Fields of the Nephilim, Massive Attack…
Combien de temps t'a pris l'écriture du livre, tout compris ?
Un
an et demi. Très rapide. Trop rapide. Je dois plus peaufiner mes
écrits.
Tu passes par le système d'autoédition d'Amazon, es-tu satisfait de
cette possibilité ?
Oui.
As tu un message à faire passer à des éditeurs ?
Pas
spécialement. Leur situation n’est pas simple. J’aimerais avoir
une relation pérenne avec l’un d’entre eux, mais ce n’est pas
gagné.
Je crois savoir que tu travailles sur la suite. Peux tu nous en
toucher un mot ?
Sous
Pression est la « prequel » de La Forme du Désespoir.
Alex est en prépa, il y découvre la musique gothique, les
éclaboussures de sang, et la folie de cet univers morbide que sont
les classes préparatoires aux grandes écoles, aberration française
-je parle en connaissance de cause.
Tes livres fétiches ?
Le
Nouveau Testament. Les trois livres de Meyrink cités précédemment.
L’Homme aux Cercles Bleus et Dans les Bois Eternels, de Fred
Vargas. Kafka sur le Rivage, de Murakami. Le Seigneur des Anneaux.
L’Herbe Rouge, de Boris Vian.
Je passe le message aux lecteurs en même temps, mais, tu le sais, ce
livre m'a vraiment ému. As tu l'ambition d'émouvoir plus de monde ?
Je
ne raisonne pas en termes quantitatifs. Si j’arrive à émouvoir
beaucoup de monde, c’est super. Si j’arrive à émouvoir une
poignée de personnes, c’est super. Mais je vis pour le sentiment,
ça c’est certain.
Quels auteurs pas forcément connus traitant de musique conseillerais
tu à nos lecteurs ?
Un
certain Pierre Avril. Tu le connais ? J’ai lu sa version des
Liaisons Dangereuses, un peu différente de celles de Laclos. Saad
Jones également. Son premier roman, Violent Instinct, m’a plu, et,
de plus, j’y ai appris beaucoup de choses. Là, je commence Voici
Venu le Temps, de Jérémie Grima. Ça promet…
Si tu devais te référer à un proverbe, une citation ?
Fais
ce que dois, advienne que pourra.
Carte blanche : ajoutes ce que tu veux !
Merci
de m’avoir donné l’opportunité de parler de ma gueule, et de
mon livre.´
Avis
aux lecteurs potentiels : si vous voulez vivre un concert de
Summoning et Bathory à l’Élysée Montmartre, achetez La Forme du
Désespoir… Ça me paraît la seule solution…