Waouh ! Comme disait Kool Shen dans "le monde de demain" : "quelle chance, quelle chance d'habiter la France". Ben oui, surtout lorsqu'on peut s’enorgueillir d'avoir sur le territoire un label aussi culte et historique que Bones Brigade Records. Promoteurs infatigables d'un Grindcore pur ou dur, voire même Powerviolence, ils sont allés aussi au fond de l'extrême avec les nuts de Last Days of Humanity. Sinon, Agathocles, Blockheads, Warfuck, Gronibard, Coffins, Brutal Truth, ça te parle jeune punk métalleux ? Eh oui, Bones Brigade !! Le Scribe
Salut Bones Brigade, vous existez depuis 1998, vous
fêtez donc vos vingt ans de méfaits, ça fait quoi ?
Pas grand chose finalement, le temps est passé sans vraiment
s'en rendre compte. Ça fait beaucoup en lisant la question mais en le vivant de
l'intérieur on ne s'aperçoit pas des années qui défilent.
Peux-tu nous raconter la genèse du label ? Quels
étaient vos objectifs à l’époque ?
Pas vraiment de but à part celui de mettre en lumière le
mieux que je pouvais avec les moyens du bord des groupes que je considère hors
du commun. Le stock, le fax, le bureau étaient dans ma chambre. Morbid Records
m'avait contacté car il ne pouvait plus sortir l'album de Last Days Of
Humanity, il n'avait plus assez d'argent pour assumer trop de sorties au même
moment et il voulait que je le fasse. Comme Hans de Last days Of Humanity
m'avait donné leur deuxième demo 3 ans plus tôt et que j'étais impressionné par
autant de violence, j'ai donc décidé de franchir le pas pour ajouter à la
distro une première réalisation qui était LDOH « The Sound of Rancid
Juices... » en CD.
Vous avez la réputation de privilégier des groupes
« bien bourrins » en tous cas particulièrement extrêmes (j’ai
interviewé Last Days… récemment) était-ce dès le départ un moyen de se
démarquer ?
Absolument aucune envie de se faire remarquer, juste le
besoin de faire découvrir des groupes qui valaient largement le coup d'être
écoutés car extrêmement violents et qui avaient une énergie différente. Je
n'avais pas l'intention de m'imposer dans une scène très forte ; Relapse,
Morbid Records, Osmose Productions, ces labels étaient au top en matière de
nouveaux talents extrêmes. Je n'avais même pas l'intention de m'y fondre, je
proposais une alternative supplémentaire, je n'ai jamais rien imposé, pas trop
de pubs, ni de promos. Par chance la scène a partagé la même passion que
j'avais pour quelques groupes qu'il y avait sur le label.
En tant que label français, quels ont été les
difficultés pour exister dans un pays connu pour…hem, la facilité d’y créer ce
genre de structure ?
Ce fut et c'est encore un joyeux bordel, à l'heure où je
réponds à ces questions, j'attends la décision du juge suite a une affaire que
j'ai porté au tribunal pour me défendre d'incohérences du R.S.I (Régime Social
des Indépendants) maintenant appelé S.S.I mais rien n'a vraiment changé à part
le nom. Le statut, les comptables ; tout ceci n'est pas évident si tu le
mélanges avec une activité orientée vers l'artistique. Une administration qui
ne s'est pas adaptée aux différentes professions. Donc la création ça va mais
ensuite il faut apprendre à gérer le stress provoqué par des inconfortables
situations financières, problèmes fiscaux, cotisations etc...
Cette interview ayant pour but d’être présente dans mon
livre sur le Grindcore, je dois vous demander : pour vous le grind c’est
quoi ?
S'il s'agit bien du Grindcore et non de ses multiples dérivés
dans ce cas c'est avant tout un style de musique engagé. Une manière de
s'indigner contre le système et de ses dommages collatéraux. Un rythme ultra
rapide, des riffs simples mais efficaces, un chant puissant, crié exprimant la
colère avec un son cru et surtout pas trafiqué ou trop produit. Des paroles qui
dénoncent le déséquilibre des classes sous le ton d'une ironie subtile ou avec
une approche beaucoup plus directe. La pollution, l'éducation, le capitalisme,
l'exploitation animale ; tous ces sujets sont trouvables dans les albums
des premiers groupes de Grindcore des années 80. C'est spontané, pas trop
travaillé ou sur-calculé, c'est une colère et une énérgie qui se retrouvent en
live, pas de place pour le défaitisme. C'est ça pour moi le Grindcore et pour
finir, c'est un style qui a une grande capacité d'adaptation pour le live car
pas besoin de grand chose, ça se joue partout.
Vous faites du grind, mais pas que, vous avez aussi au
catalogue des groupes de Powerviolence, de Hardcore, de Sludge, de Death,
Black. Qu’est ce qui préside à vos choix ?
Trois points : Bon en live, une musique qui procure des
émotions fortes et une très bonne entente avec les membres du groupe. Dans la
mesure ou j'aime m'investir sur le terrain en tournant régulièrement avec les
musiciens, le dernier point a sa raison d'être. Si la démarche est honnête et
que j'aime la musique, le style n'a pas vraiment d'importance. Je ne sais pas
m'enfermer dans un genre, il y a un choix infini et je suis fan de beaucoup
d'entre eux de plus je n'aime pas suivre les mouvances.
Vu de l’extérieur, vous semblez toujours aussi attachés
au bon vieux DIY. Est-ce le cas ?
J'aime effectivement contrôler avec le groupe un maximum de
choses en allant jusqu'au bout du projet. Les idées, la confection du disque,
plan de tournée, il y a un réel plaisir de pouvoir pratiquement tout faire et
partager les désirs des uns et des autres. Ainsi presque rien ne peut nous
échapper.
Comment êtes-vous perçus à l’étranger, et en
France ?
Je ne sais pas vraiment... En Europe en général ; j'ai
le sentiment que le label est bien accueilli, aux Etats-Unis et au Japon ;
c'est souvent les bras ouverts qu'ils prennent en distribution les productions
donc j'imagine que dans l'ensemble ça va et qu'il y a une bonne image. Je ne me
suis jamais vraiment posé la question et le vivant de l'intérieur il est
difficile de répondre.
Votre plus grande fierté en matière de signature de
groupe ?
Tous les groupes représentent une grande satisfaction et des
expériences différentes, celui peut être qui se démarque le plus fut Total Fucking
Destruction ; correspondre, travailler, tourner, la promo, je n'ai jamais
eu autant à faire avec une personne comme Richard Hoak (batteur de Brutal Truth
et Total Fucking Destruction).Il m'a confié tellement de choses concernant ses
deux groupes. Il était pro-actif, intense et il a des tonnes d'idées tous les
jours de plus avec le décalage horaire ; il y eut de nombreuses nuits
blanches. J'ai énormément appris grâce a lui, cétait la première fois que
j'avais un groupe avec des membres un peu plus âgés que moi, nous avons fait
des choses incroyables et parfois folles, ils ont toujours donné le maximum.
vous avez édité Putrefaction
in progress de LDOH…Ca fait quoi d’avoir produit le truc le plus extrême de
tous les temps ?
Je ne sais pas si c'est le plus extrême mais sans arrogance
je pense que c'est l'album de Gore Grind qui a mis le point final de ce style.
J'avais déjà une petite idée de ce à quoi s'attendre avec le Mini CD qui était
sorti quelques mois avant, mais quand j'ai reçu l'album je me suis vraiment
demandé au fur et à mesure de l'écoute quand ils allaient ralentir. Jamais les
blasts ne cessent, du début jusqu'à la fin c'est radicalement ultra rapide.
Quelle est votre vision du grind aujourd’hui ?
Elle n'a pas changé depuis que j'en écoute ; il faut
toujours faire le tri entre ces messieurs qui en font 2-3 ans histoire de jouer
les intègres, ceux qui exigent des choses en tournée qui sont en décalages avec
leurs paroles, les posers, les hypocrites et les groupes qui jouent avec leurs
tripes, qui dégagent une vraie énergie. J'ai donc une belle image du Grind
actuel à partir du moment où je fréquente uniquement des gens en adéquation
avec le style.
Question rituelle chez le Scribe du Rock : vos
dix albums préférés de tous les temps (tous styles confondus)
Sans ordre
de préférence : PUBLIC ENEMY « Fear of a Black Planet » MORBID
ANGEL « Domination » KICKBACK « No Surrender » NAPALM DEATH
« From Enslavement to Obliteration » IRON MAIDEN « The Number of
the Beast » DAFT PUNK « Random Access Memories » SLEEP
« Sleep's Holy Mountain » THE NOTORIOUS BIG « Ready To
Die » IMMORTAL « Battles in the North » DEATH ANGEL « The
Ultra-violence »
Autre rituel : ceci n’est pas une question, que
voulez-vous dire à nos lecteurs ?
La meilleure façon de soutenir un groupe qui vous procure des
émotions, d'aller de l'avant ou de voyager sans bouger de ton fauteuil c'est
d'aller au concert, lui acheter directement du merch. C'est comme un échange de
bons procédés.
Merci Bones Brigade ! Et longue vie !!!
Merci beaucoup Pierre pour ton soutien, bonne chance pour le
futur.
TU AS KIFFE L'INTERVIEW CI-DESSUS ? OK ! ESSAIE AUSSI CELLES LA !