Entretien avec WILLOW - WLWD
Worhs est un "groupe" assez unique en son genre...Déjà, musicalement, amusez vous à classer leurs albums et vous verrez. Ils ont ce "petit plus" qui rend les groupes fascinants, y compris lorsqu'ils évoluent dans un genre assez nouveau. Mix de Black Metal, de Post-Punk, de Psychédélisme, le son de Worhs ne cesse d'évoluer, à l'image de ce nouvel album sorti aujourd'hui même (si, si !) "Plus Dure Sera La Chute" qui ouvre encore de nouvelles portes dans l'oeuvre de Worhs, et qui n'était bien sûr pas encore sorti lors de cette interview avec la tête pensante du groupe, WLWD... Entretien avec une créature musicale fascinante et hors du commun...
Bonjour Willow, peux-tu nous parler
de Worhs ? Que représente ce projet pour toi ?
W : Salut ! Worhs est
le fourre-tout dans lequel je m’exprime musicalement, qui existe sous diverses
formes depuis 2009 ou 2010. Il a connu plusieurs noms mais s’appelle comme ça
depuis la sortie du premier album Le Temps des Blasphèmes il y a quelques
années. C’est un projet extrêmement intime dans lequel je mets toutes mes
tripes, ma rage, ma mélancolie et tout le reste de ce qui peut m’animer au
quotidien ou de façon ponctuelle. Nijmaa m’a rejoint en tant que batteur de
session au moment de l’enregistrement de Ballerine Sourde, et a finalement su
mettre sa patte dans le projet, ce qui fait que sur les albums à venir il est
également compositeur à 50% et qu’il y joue un peu de tout au même titre que
moi.
Votre Black Metal,
bien qu’abrasif, possède aussi des ramifications qui m’ont ramené vers le
Post-Punk. Est-ce quelque chose qui te parle ?
W : Oui complètement,
et la teneur Post-Punk est complètement assumée. C’est un genre qui me parle
beaucoup et qui constitue presque la majorité de ce que j’écoute de façon
générale. Nous avons d’ailleurs un autre projet avec Nijmaa qui s’appelle WDNxH,
qui est un mélange de Post-Punk, de Darkwave et de plus ou moins tout ce qui
peut graviter autour. Un album va sortir très bientôt par ailleurs, bien que
nous ayons déjà quelques single en ligne.
Ton premier Ep, Le
Temps des Blasphèmes, est sorti en 2014. Dans quel état d’esprit étais-tu à
l’époque ? Le style de Worhs était alors très abrasif et « raw ». Etait-ce du
aux conditions d’enregistrement ou à une volonté de ta part ?
W : Pour ce qui est
de l’état d’esprit honnêtement je ne me souviens plus exactement de tout à la
perfection. Je peux te dire que tout est parti d’un ébauche de collaboration
avec un artiste turc qui s’appelle Emir Togrul. Nous avons sympathisé au
travers d’une interview dans un premier temps, puis sommes devenus amis proches
et nous avons décidé de faire un album ensemble. Le processus était très
intense et de la composition à l’album fini il ne s’est écoulé qu’une semaine
et demi. Il s’était occupé du chant et de la batterie. Puis notre relation est
partie en vrille sur plusieurs points, je suis tombé fou amoureux de lui ce qui
n’était pas réciproque et a mis un froid entre nous, et nous ne sommes pas
tombés d’accord sur la manière de sortir cet album. De fait j’ai réenregistré
la batterie et les voix moi-même avec des moyens techniques proches du rien du
tout, et absolument aucune compétence en mixage. Tout ça a donné un album
absolument désastreux sur le plan sonore, que j’ai encore souhaité salir
davantage pour avoir un son encore pire : on parle d’une époque où je
n’écoutais grosso modo que Yayla, les Légions Noires et Manierisme. Bref, Emir
et moi ne sommes plus du tout en contact depuis ce moment et le projet a suivi
son cours, mais cette rencontre a été le « coup de pied au cul » qui m’a permis
d’avancer et de sortir ce que je composais, sans appréhension. Quoi qu’il en
soit c’est un album que je continue d’aimer, et que j’aimerais ré-enregistrer
proprement un jour dans l’optique de rendre hommage à des morceaux comme
Fanatisme, Destroyers of His Story ou La Mémoire Profanée, qui à mon sens le
méritent.
.
« Partir/Détruire »
lui a succédé en 2016. Toujours cette même noirceur, même si la présence de
contrebasse et d’arpèges de guitare folk amènent davantage de mélodie. Cet ep
est-il symbolique d’une transition, d’une évolution ?
“Partir/Détruire”
followed up in 2016. Still the same blackness, despite doublebass and folk
guitar arpeggios bringing some more melody. Is this Ep emblematic of a
transition, of an evolution?
W : Alors
effectivement je ne parlerais pas de transition, pour moi c’est simplement une
suite logique. C’est un album sensiblement plus propre, plus mélodieux comme tu
le disais, mais également beaucoup plus mélancolique. J’aime vraiment beaucoup
cet album et j’y ai un attachement très spécial, il a représenté pour moi
énormément de choses dans une période où ma vie bougeait beaucoup et où je
franchissais des caps sans trop savoir où cela me menait. Je crois qu’on y
trouve mes craintes de l’époque mais aussi mes espoirs, et le début d’un
travail sur moi-même pour mieux me comprendre. C’est un album très personnel
une fois de plus qui fait un peu office de journal intime, dans lequel j’ai
beaucoup dévoilé de moi-même. Nous sommes en train de l’enregistrer de nouveau
dans une version exclusivement acoustique, beaucoup plus riche harmoniquement,
ce qui sera je l’espère un beau moyen de rendre hommage aussi à cet opus qui compte
beaucoup pour moi.
Tu es également
porteur d’engagements, d’idéaux, peux-tu nous en dire un mot ?
W : Je suis en effet
quelqu’un de très engagé, bien que cela ne déteigne pas foncièrement sur ma
musique. Les thématiques abordées par Worhs sont, une fois de plus, des
thématiques qui me touchent directement dans la mesure où ce projet me sert
vraiment de journal intime. Ainsi, en parlant de thématiques Queer, de
thématiques liées au genre, à la sexualité, la volonté n’était pas réellement
d’en faire quelque chose de politique mais quelque chose qui me ressemble.
C’est devenu, par défaut, politique, du fait d’imbéciles venus pleurer que les
LGBT leur volaient leur Black Metal, mais pour ça je ne peux rien et c’est un
problème qui, de mon point de vue, ne regarde qu’eux. Notre démarche est
sincère, et nous ne faisons ni dans la provocation ni dans la parodie.
On en vient donc à «
Ballerine Sourde » en 2018. A qui fait référence ce titre d’album ?
W : A moi ! J’avais
un projet de Harsh Noise Wall qui s’appelait Deaf Ballerina à ce moment-là et
qui m’a beaucoup porté notamment au travers de collaborations et d’échanges
passionnants avec Julien Skrobek, une des personnes notables de ce mouvement.
C’est un intitulé qui résume parfaitement mes dualités et contradictions
permanentes, tout en introduisant la thématique du genre qui est absolument
prédominante dans ma vie depuis mon plus jeune âge.
Ce dernier album est
plus « accessible » que les précédents, même si les ingrédients sont les mêmes
(un black metal mid-tempo ou doom, une voix arrachée qui parfois chante, des
instruments parfois inhabituels). Ton évolution musicale te porte t’elle
naturellement vers plus de musicalité ? Est ce une forme de « maturation » ?
W : Oui complètement,
la musique est quelque chose que je découvre au fil de l’évolution de Worhs. Du
premier album à maintenant j’ai acquis des connaissances plus pointues en musicologie
ainsi qu’une formation en mix qui me permettent d’avoir une marge de manoeuvre
plus imposante. Je pense que Ballerine Sourde conclut une lignée d’albums dont
la recette a été épuisée. A présent, et ce dès notre quatrième album qui
sortira très prochainement (le mix est quasiment fini, il est juste questions
de peaufinages), la musique est éminemment plus riche et plus complexe. Mon
travail d’écoute n’est pas le même non-plus et Nijmaa a su apporter une
dimension beaucoup plus libre de la création sonore, là où j’étais enfermé dans
des carcans dont je ne parvenais pas à sortir. Notre alchimie est parfaite en
ce sens : il n’y a jamais de compromis mais que des solutions qui nous
conviennent réellement à tous les deux, toujours au service de la musique et
pas de nos egos.
Quel est ton regard
sur la scène Black Metal contemporaine ?
W : Pour être franc
avec toi, je ne la connais pas. Je n’écoute quasiment plus de Black Metal
aujourd’hui, je crois que je sature de n’avoir écouté que ça pendant vraiment
longtemps. Donc je ne sais pas du tout ce qui se fait pour l’heure, mais toute
démarche visant à faire évoluer ce mouvement est la bienvenue à mon sens, au
même titre qu’il n’est pas déconnant de vouloir faire du Black Metal
exclusivement à l’ancienne. C’est une forme d’expression assez libre, autant en
profiter !
Les groupes qui t’ont
le plus inspirés ?
W : Gris et Nargaroth
dans un premier temps pour sûr, puis par la suite de plus en plus de choses. Je
suis plus ou moins obligé de parler au présent, à une heure où nous avons fini
de composer le cinquième album là où le quatrième n’est même pas sorti, mais je
dirais King Crimson, Magma, Hypno5e et Kickback.
Tes 20 albums
préférés ?
Dans un désordre
absolu, et en gardant en tête que si tu me reposes la même question demain
j’aurai changé d’avis dix fois : 1. Gris - Il était une forêt 2. Lana del Rey -
Born to Die 3. Amesoeurs - Amesoeurs 4. Blacklodge - MachinatioN 5. Decline of
the I - Inhibition 6. Kickback - No Surrender 7. Magma - Kohntarkosz 8. Liturgy
- Vitriol 9. Hypno5e - Shores of the Abstract Lines 10. Gris - A l’Âme
Enflammée, l’Âme Constellée 11. Make a Change… Kill Yourself - II 12. She Past
Away - Belirdi Gece 13. Lebanon Hanover - Why Not Just Be Solo 14. Magma -
Emehntehtt-re 15. King Crimson - The ConstruKction of Light 16. Deicide -
Deicide 17. Nargaroth - Amarok 18. Etienne Daho - Les Chansons de l’Innocence
Retrouvée 19. Archspire - Relentless Mutation 20. Bell Witch - Mirror
Reaper
Ton message au monde
?
W : Qu’il se démerde
et qu’il me foute la paix.
Ajoute ce que tu veux
:
W : Merci pour ton
temps ! On a plein de projets quasiment prêts à sortir dont l’album de WDNxH
pour celles et ceux qui aiment danser. Pour Worhs le quatrième album « Plus
Dure Sera la Chute » arrive bientôt et marquera un changement radical. Un album
commun à nos deux projets et en gestation également et bref, on a hâte de
sortir tout ça et de se focaliser sur le cinquième album de Worhs qui, je
l’annonce, va nous demander un travail absolument titanesque. A bientôt ! Merci
Willow !
Worhs is a pretty unique "band"...Already, musically, have fun sorting out their albums and you'll see. They have that "little extra" that makes bands fascinating, even when they evolve in a fairly new genre. A mix of Black Metal, Post-Punk, Psychedelia, Worhs' sound keeps on evolving, like this new album released today (yes, yes!) "Plus Dure Sera La Chute" which opens new doors in Worhs' work, and which of course wasn't yet released during this interview with the band's thought leader, WLWD... Interview with a fascinating and unusual musical creature...
Translation by SHEITAN BLOCH
Hi Willow, can you tell us a bit about Worhs? What is this project to you?
Hi! Worhs is the catch-all in which I musically express myself
and it has been existing since 2009 or 2010 in various forms. It was known
under several names but it's been called this way since the first album release
“Le Temps Des Blasphèmes” some years ago. It's a very intimate project in which
I put all my guts, my rage, my melancholy, and all that may move me, either
daily or occasionally. Nijmaa initially joined me as a session drummer during
the recording of Ballerine Sourde, he learnt how to bring his personal touch to
the project, so he is half-composer and multi-instrumentist just like me on the
upcoming albums.
Your Black Metal, albeit abrasive, has ramifications
that brought me back to Post-Punk. Does this speak to you
Definitely, and the post-punk content is totally
assumed. I feel in touch with this genre and generally it's almost the majority
of what I listen to. Hence this other project called WDNxH we have with Nijmaa,
which is a blend of Post-Punk,Darkwave, and more or less anything in this
sphere. An album is due very soon, but there already are some singles online
You released your first Ep “Le Temps
des Blasphèmes” in 2014. What was your state of mind at that time? The style of
Worhs was very abrasive and raw back then. Was it due to the recording process
or was it intentional?
As for the state of mind, I don't
remember everything perfectly. What I can tell you though is that it all began
with the draft of a collaboration with turkish artist Emir Togrul. We first got
on through an interview, then we became close friends and decided to make an
album together. The process was very intense and it took only a week and a half
from composition to finished album. He had done the singing and the drums. Then
our relationship spinned out of control on several levels, I fell madly in love
with him, which wasn't reciprocal and cast a chill between us, and we couldn't
agree on how to release this album. So I redid the drums and the voices myself,
with technical means close to nothing and absolutely no competence in mixing.
All this resulted in a sonically utterly disastrous album, that I wanted to
soil more to get an even worse sound: we are talking of a time by which I
almost only listened to Yayla, Légions Noires et Manierisme. Anyway, since then
Emir and I are not in contact anymore and the project went on its way, but this
encounter was the trigger that allowed me to go forwards and release my
compositions without apprehension. I still love this album, I'd like to
re-record it properly one day so to pay my respects to tracks like Fanatisme,
Destroyers of His Story or La Mémoire Profanée which, to me, deserve it.
“Partir/Détruire” followed up in
2016. Still the same blackness, despite doublebass and folk guitar arpeggios
bringing some more melody. Is this Ep emblematic of a transition, of an
evolution?
I wouldn't call it a transition,
it's only the logical follow-up to me. It's a distinctly cleaner and, as you
pointed out, more melodic album, but also much more melancholic. I really love
this album with a very special feeling, it meant much to me at a time when my
life was changing a lot and I was passing milestones without really knowing
where I was going. I believe you can find my fears of those days within it, but
also my hopes and the beginning of a work on me to better understand myself.
Once again it's a very personal album, a bit like a diary, in which I exposed a
lot of me. We are currently in the process of re-recording an unplugged
version, much richer harmonically, and I hope it will beautifully pay its
respects to this meaningful and special opus to me.
You also bear commitments and
ideals, can you tell us about them?
I am indeed very committed, athough it doesn't fundamentally
reflect in my music. Once again, the thematics in Worhs are directly linked to
me as this project is really a personal diary. So, when talking about queer,
gender, sexuality, it's not about making something political but rather about
making something that resembles me. It became political because of morons
crying that LGBT were stealing their black-metal, but I can't do anything about
that and for me it's only their problem. Our process is sincere, we don't
indulge in provocation or parody.
“Ballerine Sourde” is released in 2018. Who references
this title?
Me! At that time I had a Harsh Noise
Wall project called Deaf Ballerina that sustained me through collaborations and
passionate exchanges with Julien Skrobek, one of the notable figures of this
movement. It's a name that perfectly sums up my dualities and permanent
contradictions, as well as introduces the gender theme, which is absolutely
proeminent in my life since I am young.
This latest album is more “accessible” than the previous ones,
even if the ingredients are the same (a mid-tempo or doom black-metal, a torn
voice sometimes singing, and sometimes unusual instruments). Does your musical
evolution naturally bring you towards more musicality? Is it some sort of
“maturation”?
Completely, music is something I have been discovering through
the evolution of Worhs. Since the first album I have acquired a more
comprehensive knowledge of musicology and a mixing training that have allowed
me a bigger room for maneuver. I think that Ballerine Sourde ends up a series
of albums whose recipe has run dry. From now and our soon-to-be-released fourth
album on (mixing is almost done, only a few tweakings left), music is eminently
richer and more complex. My listening process isn't the same anymore and Nijmaa
brought me a much more free dimension in sonic creation, where I was stuck in
constrainsts I couldn't escape. In this way our alchemy is perfect: there are
no concessions but solutions that really fit both of us, always at the service
of music and not of our egos.
What is your opinion on the contemporary Black Metal scene?
To be honest with you I don't know it. I almost don't listen to
Black Metal anymore these days, I think I've reached saturation point from
having been listening to only that for so long. So I really don't know what is
done nowadays, but I welcome every approach that tends to make this movement
evolve, as well as it is not stupid either to keep doing old-school Black-metal.
It's quite a free way of expression, so let's make the most of it!
The most inspiring bands for you?
First and obviously Gris and Nargaroth, then more and more
things. I have to talk in the present tense as the fifth album is already
composed while the fourth one isn't realised yet, and I would say King Crimson,
Magma,
Hypno5e and Kickback.
Your top-twenty albums?
In absolute disorder, and keeping in mind that my opinion will
have changed ten times if you ask me the same question tomorrow:
1. Gris - Il était une forêt 2. Lana
del Rey - Born to Die 3. Amesoeurs - Amesoeurs 4. Blacklodge - MachinatioN 5.
Decline of the I - Inhibition 6. Kickback - No Surrender 7. Magma - Kohntarkosz
8. Liturgy - Vitriol 9. Hypno5e - Shores of the Abstract Lines 10. Gris - A
l’Âme Enflammée, l’Âme Constellée 11. Make a Change… Kill Yourself - II 12. She Past Away -
Belirdi Gece 13. Lebanon Hanover - Why Not Just Be Solo 14. Magma -
Emehntehtt-re 15. King Crimson - The ConstruKction of Light 16. Deicide -
Deicide 17. Nargaroth - Amarok 18. Etienne Daho - Les Chansons de l’Innocence
Retrouvée 19. Archspire - Relentless Mutation 20. Bell Witch - Mirror Reaper
Your message to the world?
That it minds its own business and
leaves me alone.
Add what you wish :
Thanks for your time!
We have lots of projects almost ready for release, of which the WDNxH album for those inclined to dance. Concerning Worhs
the fourth album « Plus Dure Sera la Chute » is out soon and will mark a
radical move. A collaboration album between our two projects is also in the making
and we look forward to releasing all that and getting focused on the fifth
Worhs album, which, mark my word, will need a absolutely colossal work from us.
See you soon!
Thanks Willow!