Interview avec Roro Perrot (Vomir, Saboteur Saboteur...)
Que ce soit avec ton projet principal Vomir, ton label DIY Decimation Sociale et les projets/groupes que tu y abrites tu fais la promotion d'un genre que tu as toi même créé : la harsh noise wall. Pourrais tu nous en dire un peu plus sur ce concept et l'histoire derrière ?
Pour être précis, et pour ne pas embrouiller tes lecteurs, le Harsh Noise Wall est associé à mon projet VOMIR, pas aux autres (j’y reviendrai).
VOMIR est issu de recherches sonores que j’ai commencé en 2005, quand ma pratique de la guitare noise me lassait (débutée en 1996) et que je cherchais à produire un bruit continu – mais sans être un ‘drone’. Après quelques noms divers, VOMIR s’est imposé. Je distribuais mes CDR au Bimbo Tower et j’y découvre les productions américaines autour du label iheartnoise, et une pratique similaire à la mienne, notamment de The Rita. Lettres, échanges, coproductions… le Harsh Noise Wall avait ses pionniers (The Rita, Werewolf Jerusallem et moi-même). Des trois, je suis peut-être celui qui a le plus œuvré dans le genre, en y apportant une certaine esthétique (réclusion, refus…), des manifestes etc… en outre je précise que le HNW a de multiples courants, je ne représente qu’une certaine idée du genre…
Quand on écoute les longs drones de distorsion de Vomir on peut penser à Merzbow mais aussi aux pionniers de la power electronics comme Whitehouse. Sont-ce des artistes qui t'ont influencé et, le cas échéant, quels autres artistes ont eu un impact significatif sur ton oeuvre ?
Tout à fait. Mes influences sont multiples, et le japanoise, toute la scène industrielle et PE européenne, la harsh noise US sont mes disques de chevet. En revanche je n’aime pas faire des listes, le ‘name-dropping’… j’oublie toujours quelqu’un et il y en aurait trop. Mais depuis les futuristes jusqu’à aujourd’hui, j’ ai essayé de me constituer une connaissance potable de la musique bruitiste, tout genre confondu.
Quel(s) but(s) t'es-tu fixé avec Décimation Sociale ?
Je n’ai aucun but avec Décimation Sociale, si ce n’est de réaliser mes projets sans rien demander à personne. J’aime aboutir un disque avec une sortie physique, et mes faux labels (tout est DIY) servent à cela. Avant DS, il y a eu MaisonBruit et Period Records. J’édite également des graphzines sous le nom d’Absurdum.
Tu as sorti en septembre 2019 un split entre Vomir et Délinquance Juvénile. Peux tu nous parler un peu de ces derniers et du split lui-même ?
DJ, un projet noise français qui agit également sous le nom de Chibre.
Je fais très souvent des split, je suis souvent contacté pour toutes sortes de sorties et propositions.
Vomir a t'il une volonté de rendre malade l'auditeur ?
Oh absolument pas. Il n’y pas de volonté dans Vomir. Encore moins de rapport à se faire du mal ou à se tourmenter. Le Harsh Noise est tout le contraire. Je pratique le bruit car cela me fait du bien. Un concert de Vomir c’est plutôt se déconnecter complètement. Le bruit a cette faculté de masser les ondes électriques de nos caboches… en revanche, ce n’est pas tout à fait la même chose qu’un joli drone new-age méditatif, tourné vers la beauté et l’empathie. Mon bruit provoque le repli sur soi, l’époché (la mise en parenthèse) de ce qui nous entoure, et des hallucinations auditives.
Parmi tes autres projets on trouve notamment Trou Aux Rats avec lequel tu as sorti un ep en Janvier. Comment distingues tu tes projets ? A première vue Trou aux rats parait moins directement “abrasif” que Vomir ? Bravo pour le jeu de mots sur True Aura !
Trou Aux Rats révèle mon côté romantique et morbide (gothique quoi !). Ce sont des orgues synthétiques improvisés, des litanies lancinantes, des atmosphères parasitées. J’ai sorti deux LP en vinyle, des cassettes, un double CD à venir… un projet avec une esthétique particulière, moi masqué monstrueusement dans les bras de mes love-doll japonaises… Trou Aux Rats est la suite du projet Free As Dead, qui est un court-métrage (visible sur YouTube).
Autre projet, cette fois en compagnie de Yves Botz, Saboteur Saboteur. A l'écoute de votre premier album sorti en septembre, on se dit que vous êtes mûrs pour l'HP, non ? Est ce d'ailleurs une des inspirations de ce projet, la folie et les institutions psychiatriques ?
Cela fait quelques temps que nous jouons avec Yves, un grand Maître pour moi (ses écrits, sa noise guitare dans Dust Breeders…). Il a apprécié mon ‘shit folk’ (aka Roro Perrot) et nous avons décidé de jouer et d’enregistrer ensemble. Saboteur Saboteur (CD) est notre deuxième sortie. C’est peut-être en effet un hommage à l’art brut que nous aimons temps. En tout cas une synthèse malade d’un punk injoué et d’improvisations sauvages.
Restons un peu sur la question de la folie : quelqu'un qui n'a jamais écouté de Harsh Noise qui tombe sur ton bandcamp va flipper un bon coup. Quels sentiments cherches tu a extérioriser ? Est-ce cathartique ? Vois tu une relation avec l'art conceptuel ou la performance ?
On peut rattacher ma pratique bruitiste à de l’art conceptuel ou à de la performance, mes concerts en sont proches (je reste figé sur scène un sac poubelle me couvrant le visage, sacs que j’ai également distribué au public). Mais je revendique surtout le bruit pour le bruit, sans artifice, sans festivité, sans résultat.
Il y a eu aussi Maginot avec Paul Hegarty de SAFE récemment. Un vrai délire de Free Noise avec des relents putréfiés de l'industriel des débuts. Un mot ?
Oui une autre collaboration avec des voix et des bribes bruitistes, dans un maelstrom du ratage. Nous jouons à Londres en février au Café Oto pour la sortie du disque.
Tes 20 albums préférés de tous les temps dans tous les styles ?
Comme je te l’ai dit, impossible pour moi de faire des listes.
Pendant que j’écris j’écoute les boxsets des rééditions du fabuleux label japonais Vanity records.
Ajoutes ce que tu veux, même du bruit !
Merci pour ces questions. Voici des liens pour me trouver :
reclusoir.com
decimationsociale.bandcamp.com
vomir.bandcamp.com
sur YouTube : Roro Perrot
Merci Roro
INTERVIEW RORO PERROT IN ENGLISH
Whether it is with your main project Vomir, your label DIY Decimation Sociale and the projects/groups you host there you promote a genre you created yourself: the harsh noise wall. Could you tell us a little bit more about this concept and the story behind it ?
To be precise, and in order not to confuse your readers, the Harsh Noise Wall is associated with my project VOMIR, not with the others (I'll come back to this later).
VOMIR is the result of sound research that I started in 2005, when I was bored with my noise guitar practice (started in 1996) and wanted to produce a continuous noise - but without being a 'drone'. After a few different names, VOMIR came to the fore. I was distributing my CDRs at the Bimbo Tower and I discovered American productions around the iheartnoise label, and a practice similar to mine, notably of The Rita. Letters, exchanges, co-productions... the Harsh Noise Wall had its pioneers (The Rita, Werewolf Jerusallem and myself). Of the three, I am perhaps the one who worked the most in the genre, bringing a certain aesthetic (imprisonment, refusal...), manifestos etc... moreover I specify that the HNW has multiple currents, I represent only a certain idea of the genre...
When you listen to Vomir's long distortion drones you can think of Merzbow but also of the pioneers of power electronics like Whitehouse. Are these artists who influenced you and, if so, which other artists had a significant impact on your work?
Absolutely. My influences are multiple, and the Japanese, the whole European industrial and EP scene, the US harsh noise are my bedside records. On the other hand I don't like making lists, name-dropping... I always forget someone and there would be too many of them. But from the futurists to today, I've tried to build up a decent knowledge of noise music of all kinds.
What goal(s) did you set yourself with Decimation Sociale?
I have no goal with Decimation Sociale, except to realize my projects without asking anything from anyone. I like to make a record with a physical release, and my fake labels (everything is DIY) are used for that. Before DS, there was MaisonBruit and Period Records. I also edit graphzines under the name Absurdum.
You released a split between Vomir and Délinquance Juvenile in September 2019. Can you tell us a little bit about the latter and the split itself?
DJ, a French noise project that also acts under the name of Chibre.
I very often do splits, I'm often contacted for all kinds of releases and proposals.
Does Vomir have a will to make the listener sick?
Oh absolutely not. There is no will in Vomit. Even less a will to hurt or torment oneself. Harsh Noise is the exact opposite. I practice Noise because it makes me feel good. A Vomir concert is more like a complete disconnection. Noise has this ability to massage the electric waves of our noggas... on the other hand, it is not quite the same thing as a pretty meditative new-age drone, turned towards beauty and empathy. My noise provokes withdrawal, the epochal (the putting in brackets) of what surrounds us, and auditory hallucinations.
Among your other projects are Trou Aux Rats with which you released an ep in January. How do you distinguish your projects? At first glance Trou aux rats seems less directly "abrasive" than Vomir ? Bravo for the pun on True Aura!
Trou Aux Rats reveals my romantic and morbid (gothic) side. They are improvised synthetic organs, haunting litanies, parasitized atmospheres. I released two vinyl LPs, cassettes, a double CD to come... a project with a particular aesthetic, me monstrously masked in the arms of my Japanese love-doll... Trou Aux Rats is the sequel of the Free As Dead project, which is a short film (visible on YouTube).
Another project, this time with Yves Botz, Saboteur Saboteur. Listening to your debut album released in September, one thinks you're ripe for HP, don't you? Is that one of the inspirations for this project, madness and psychiatric institutions?
We've been playing with Yves, a great master for me for some time now (his writings, his noise guitar in Dust Breeders...). He liked my 'shit folk' (aka Roro Perrot) and we decided to play and record together. Saboteur Saboteur (CD) is our second release. Maybe it's indeed a tribute to the art brut that we love at that time. In any case a sick synthesis of injoué punk and wild improvisations.
Let's stick to the madness: someone who's never listened to Harsh Noise falling on your bandcamp will freak out a lot. What feelings are you trying to get out? Is it cathartic? Do you see a relationship with conceptual art or performance art?
You can relate my noise practice to conceptual art or performance art, my concerts are close to it (I stay frozen on stage with a garbage bag covering my face, bags that I also distributed to the public). But above all I claim noise for noise's sake, without artifice, without festivity, without result.
There was also Maginot with Paul Hegarty from SAFE recently. A real Free Noise delirium with putrefied hints of the early industrialist. A word?
Yes, another collaboration with noisy voices and snippets, in a maelstrom of failure. We're playing in London in February at the Café Oto for the release of the album.
Your 20 favourite albums of all time in all styles?
As I told you, it's impossible for me to make lists.
While I write I'm listening to the boxsets of the re-releases of the fabulous Japanese label Vanity records.
Add whatever you want, even noise!
Thank you for these questions. Here are some links to find me:
on YouTube: Roro Perrot
Thank you, Roro.
NOISE IS GOOD FOR YOUR BRAIN
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