Salut Jeff ! Bienvenue de nouveau chez Le Scribe, ce n'est en effet pas la première fois que nous échangeons autour de ton travail, qu'il s'agisse d'arts plastiques ou de musique. Cette fois nous allons nous concentrer sur deux projets, un avec lequel tu as déjà réalisé plusieurs sorties, Kesys, et l'autre qui est tout nouveau, qui s'intitule Prisme. Ep 1 by Kesys Peux tu nous parler du nouvel EP de Kesys, toujours avec ce dark folk des plus planant ? Planant, oui. Dark folk ? Mouais, beaucoup moins. Ce nouvel EP, c’est plutôt du post-rock/folk avec un petit goût de progressif. Si je compare avec mon album précédent, Ascent Fall, on est clairement dans un autre mood. À l’époque, je traversais une période bien chaotique, et ça s’entendait dans la musique : sombre, intense, presque dramatique. Là, c’est différent. Après la tempête, la lumière revient – et cet EP, c’est un peu cette bouffée d’air frais. J’avais aussi envie de casser un peu les codes du néo-...
LES CROCS DU SCRIBE SPECIAL RAP - PUBLIC ENEMY - SCARLXRD - NERGRISEN - ELKK - MORA PROKAZA - URATSAKIDODGI - VII - VIRUS
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PUBLIC ENEMY - SCARLXRD - NERGRISEN - ELKK - MORA PROZAKA - URATSAKIDODGI - VII - VIRUS
YO ! A celles et ceux qui sont surpris de voir du rap dans le scribe du rock : déjà c'est loin d'être la première fois que j'en cause. De plus, j'en écoute depuis les années 80, ayant commencé avec Public Enemy, Run DMC et les Beastie Boys pour ensuite me pencher sur la scène française de l'âge d'or avec NTM, IAM ou ASSASSIN, entre autres, ensuite me faire défoncer par Eminem, le rap west coast de NWA et dérivés (Ice Cube, Dr Dre, Eazy E, Snoop Doggy Dogg puis Snoop Dogg, Cypress Hill et House Of Pain) et le rap east-coast bien sûr aussi avec Wu-Tang Clan entre autres...
Les années récentes m'ont vu déchanter face a la vague rap variétoche autotuné en France (Jul si tu nous lit) qui n'est de toute façon pas du rap, mais aussi m'enthousiasmer sur la récente wave de la trap metal, avec ses virulents dérivés comme la black metal trap, la deathtrap ou la trap industrial tout en kiffant les sons intelligents de VII ou de Virus et le rap faussement rigolo du Klub des Loosers...
Voici donc un dossier sur le rap au sens large, et que mes poteaux métalleux ne s'inquiètent pas, y'a aussi du virulent au programme, avec la partie trap metal représentée par Scarlxrd, Nergrisen et Elkk, et le black metal serti de trap des biélorusses de Mora Prozaka ou du black hop russe de Uratsakidodgi...
En voiture simone, y'a le MC qui nous attend !
RENDONS A CÉSAR : PUBLIC ENEMY !!!
Déjà un quinzième album qui se profile a l'horizon pour Public Enemy ! Cela ne rajeunit pas votre Scribe qui a grandi avec les rimes bruts de décoffrages et les samples terroristes de ces pionniers du rap..
En attendant ce nouvel opus (baptisé What You Gonna Do When the Grid Goes Down ), vous pourrez vous régaler les oreilles avec la version 2020 du classique du groupe new yorkais : "Fight The Power" !
Plus de trente ans après leurs débuts, Chuck D, Flavor Flav persistent et signent : le gouvernement américain peut continuer a trembler, les warriors du rap sont encore en éveil.
Et, pendant qu'on y est, voila le premier extrait du futur album, avec au poste de Dj Mr Dj Premier, himself !! (Gangstarr). Un extrait qui montre le gang de Long Island, New York, dans une forme insolente, trente ans après l'énorme Fear Of A Black Planet ("Power to the people" ! "991 is a joke" ! "Fight The Power" !!)...
HAS BEEN, PE ?
Pourtant, depuis longtemps maintenant, les sorties du gang se sont faites plus confidentielles, ne trustant plus les playlists pop comme à l'époque de leurs albums emblématiques, It Takes Nation of Millions To Hold Us Back et autres Fear Of A Black Planet. Que s'est-il passé ? Comment ces inspirateurs du mouvement Black Lives Matter, scandaleux en leur temps (on se souvient des défilés paramilitaires et des déclarations antisémites et homophobes de Professor Griff, l'un de leurs membres et "ministre de l'information") et considéré comme l'un des combos de rap les plus dangereux du monde ont-ils pu sombrer dans un relatif oubli depuis le début du XXIème siècle ? Les modes ont traversé le rap comme des météores, et le rap west coast, made in California, a fait très mal aux new yorkais. Les années 90 auront été celles du gangsta rap, avec les idoles Tupac Shakur et son chef d'oeuvre All Eyes On Me, ou les succès des membres de NWA (Niggaz With Attitude), groupe qui fit trembler l’Amérique a la manière d'un PE pas engagé politiquement mais revendiquant son attitude et son passif gangsta...Avec les succès solo de Eazy E, Dr Dre, Ice Cube qui ont mis le feu aux platines, et servi de bande son pour les clash mortels entre côte est et côte ouest.
INTERRUPTION DE VOS PROGRAMMES !
Bon, vu le temps que me prend ce dossier, il se trouve que l'album de Public Enemy dont je parle quelques lignes plus haut a fini par sortir ! Bon, on ne se démonte pas chez le Scribe du Rock Rap ! allez zou, par ici la chronique ! Non mais !
Vous faites peut-être partie de ceux qui pensent que Public Enemy a disparu avec le nouveau millénaire ? Peut être croyez vous que le groupe a splitté après les cartons planétaires de Fear Of A Black Planet (1990) ou Apocalypse 91 (en ...1991 !) ? Il est vrai que les albums sortis après ont eu de moins en moins de retentissement. Pourtant, les terroristes du rap new yorkais n'ont jamais splitté, ni même ralenti leur production. Chuck D et Flavor Flav, entourés d'un line-up a géométrie variable, ont continué d'hanter les ondes de leur rap militant et hargneux, malgré un succès qui est allé en décroissant. Ainsi, dès Muse Sick n hour mess age (1994), Public Enemy va progressivement quitter les manchettes de journaux, remplacé par une nouvelle génération de rappers plus scandaleux, et sans morale, regroupés sous le terme générique de "gangsta rap" et basés principalement sur Los Angeles (NWA, Ice Cube, Ice T, Dr Dre, Eazy E, Snoop Dogg, Tupac...). Le rap conscient et politisé des ennemis publics est alors has-been, remplacé par une apologie des filles faciles, de la drogue, de la vie OutlawI. L'argent facile est devenu le seul horizon et Chuck D ne s'y retrouve pas. A la fin des 90's le groupe est même dégagé du label Def Jam (de Rick Rubin) sur lequel il avait connu ses grands succès. Pourtant, les new yorkais enchainent les albums, parfois même en autoproduction, toujours déterminés à faire passer leur mess-age.
2020 s'annonce bien pour PE : le g-rap est mort, les révoltes politiques (Black Lives Matter entre autres, qui rentre en écho avec une partie des considérations du groupe) semblent de nouveau avoir le vent en poupe, le Coronavirus, Donald Trump, les élections en Novembre. Bref, idéal pour un retour dans la lumière. Le nouvel album s'intitule What You Gonna Do When The Grid Goes Down ? et a toutes les chances d'enfin ramener le gang révolutionnaire dans l'actualité. Des sonorités 80's comme s'il en pleuvait, avec force scratchs, beats old-school, samples d'enfer comme au bon vieux temps et une liste d'invités hallucinante : Run DMC, Ad-Rock et Mike D des Beastie Boys, Dj Premier, Cypress Hill, Ice T pour un choc east-coast vs west-coast ! Un retour sur leur label historique Def Jam, des riffs de guitare metal comme au bon vieux temps des premiers Beastie et Run DMC, bref, un plat de choix !
Le groupe balance même une nouvelle version de son classique "Fight The Power" qui, tout en restant fidèle a l'original, en rajoute une louche en matière de contestation. Il serait étonnant qu'un tel album n'ait pas le succès escompté, voire même qu'il ne relance pas une nouvelle vague de rap à l'ancienne qui pourrait bien déjouer les plans de la trap toute puissante.
Alors, même si le groupe n'a jamais arrêté ses activités (et son activisme) tout cela ressemble fort a un comeback pour le grand public. PE va t'il réussir a se relancer et conquérir le public des millenials ? A suivre dans les prochains mois. Toujours est-il que l'album est une réussite artistique, qui aurait très bien pu sortir en 90 ou 91, sans pour autant que le groupe sonne passeiste. On retrouve avec plaisir ce rap virulent, ce punk black que PE avait en grande partie installé a l'époque, et l'on se dit qu'on ne serait pas perdants a retrouver plus souvent ce (vrai) rap dans nos oreilles maltraitées par la variété urbaine. Yo ! Bum Rush The Show !
Vous connaissez Scarlxrd ? Non ? Eh bien il s'agit tout simplement d'un des leaders de la vague trap metal qui déferle depuis quatre ou cinq ans. Aux côtés de Ghostemane et des débuts de XXXTentacion, l'oeuvre de l'anglais a beaucoup contribué a lancer cette variante de la trap orientée sur la violence sonore, composée d'un rap hurlé sur des rythmiques énormes, avec des samples de guitares metal ou de noise, et une ambiance noire a couper au couteau.
Marius Lucas Antonio Listhrop (c'est son vrai nom) a commencé sa carrière en 2013/14 comme youtubeur sous le patronyme de Mazzi Maz. Il enchaîne ensuite rapidement par la création d'un groupe de néo metal nommé Myth City avec lequel il sortira un seul et unique Ep en 2015.
Aaah Scarlxrd ! Ceux qui me connaissent un peu savent toute la considération que j'ai pour le travail de ce jeune anglais, pionnier et porteur de lumière de la Trap Metal, courant en plein essor dont vous réentendrez parler souvent dans les prochaines semaines chez le Scribe du Rock tant je suis convaincu qu'on tient quelque chose de vraiment nouveau et excitant, qui risque de peser lourd dans le futur des musiques rock et extrêmes en particulier.
J'avais tout simplement adoré "DXXM" précédent effort du seigneur des cicatrices paru courant 2018 (le 4 mai pour être précis). Ainsi, ce "Infinity", sorti le 15 Mars, n'a t'il pas traîné à succéder a ce bouillon de Trap Industrielle et métallisée qu'était "DXXM" (que je conseille d'ailleurs a tous les métalleux un peu blasés mais trop bornés qui auraient envie d'un truc neuf et frais pour se pêter les tympans). Toujours agressif et sombre, le son de Scarlxrd se fait ici nettement moins "Metal" (moins de grosse grattes) sans pour autant tomber dans la guimauve, loin de là. Non, il semblerait plutôt que le briton ait voulu replonger dans un univers plus Hip Hop, avec une mise en avant de son flow (il faut dire particulièrement excitant !).
Ne vous fiez pas à cette pochette d'une laideur peu commune (surtout comparée à celle de DXXM, particulièrement réussie) et laissez vous faire par cette "Dark Trap" aux ambiances horrorcore dignes de Freddy Krueger et aux lyrics bien salés. Scar, comme je le disais, a beau délaisser (temporairement ?) le côté Metal, sa Trap reste violente, lourde, bourdonnante, méchante comme la teigne et cette évolution est somme toute fort logique, nous prouvant que ce leader de la scène naissante n'a pas besoin d'avoir recours à des gimmicks venus du rock pour nous faire vibrer. Comme le Wu-Tang Clan, Cypress Hill, Onyx, House of Pain ou Eminem avant lui, Scarlxrd fait sonner le hip hop comme un genre ténébreux et puissant qui n'a rien a envier à notre bon modèle guitare-basse-batterie. L'avenir lui appartient.
Vous vous souvenez des débuts de Scarlxrd ? Ce dernier, après une période que l'on pourra qualifier de "Trap Metal" (genre qu'il a quasiment inventé) où il mixait un rap/trap hurlé et énervé, des ambiances morbides et des guitares Metal avec des boites à rythme saturées et qui va culminer avec le chef d'oeuvre Dxxm en 2018 (quel monument !) a semble t'il tourné la page.
Avec ce deuxième album en 2019 après le très bon Infinity Scarlxrd se rapproche encore un peu plus du Rap et quitte (définitivement ?) le côté Metal de la force. Pourtant, comme sur le précédent album, l'énergie est toujours bien là, la colère aussi, simplement elles sont concentrées sur un Rap Hardcore nouvelle formule moins Rock'n'Roll mais tout aussi efficace. La vérité est simple : les albums de Scarlxrd, moins uniquement basés sur le bruit et la fureur, sont plus variés et d'une écoute plus agréable.
Nous verrons si la suite confirme ce virage "street crédible" (malgré les rumeurs persistantes d'un Dxxm Volume 2 !) mais nous sommes sûrs d'une chose : ce mec a un talent fou, une créativité sans limites et il n'a pas besoin de samples de guitares pour sonner "dur": Scarlxrd c'est le son du futur !
Je conclurai cette partie consacrée à Scarlxrd en parlant de ce qui, selon moi, constitue son album phare : DxxM, paru en 2018, et qui contient le matèriel le plus heavy et dérangeant de l'anglais...
SCARLXRD
DXXM
2018
Avec "Dxxm" (Doom, en anglais non "trappé") Scarlxrd a sorti un pavé dans la mare de la trap metal. Orné d'une pochette splendide, ce monolithe de violence noire est parfois difficile a supporter sur la durée, tant les sons distordus et les infra-basses élephantesques l'envahissent. Scarlxd y hurle comme jamais, entouré d'overdrive et d'ambiances noires comme la suie.
Bref, si, par la suite, comme je le mentionne dans les chroniques des deux albums qui suivront (cf les chros du dessus) Scarlxrd va sembler vouloir s'éloigner quelque peu de cette trap metal brute de décoffrage, Dxxm peut sembler l'aqmé de ce genre, avec une recette savante d'ingrédients comme la violence urbaine retranscrite en musique, mais aussi une souffrance exprimée dans le flow qui renvoie au Korn de l'époque du premier album. Néanmoins, Scarlxrd, même influencé par le metal, le punk et le rock alternatif, reste foncièrement un artiste hip hop, et ses albums suivants appuieront cet aspect.
Souvent, les contempteurs de la trap metal lui reproche de ne pas avoir produit d'artiste majeur apte a transcender la scène, a toucher un public en dehors du game. Cet album de Scarlxrd avait tout pour le faire, mais le karma en décide autrement. Il est vrai que, dans l'histoire du rock comme dans celle du rap, un genre a besoin d'une locomotive pour rentrer dans l'histoire. Scarlxrd, comme Ghostemane, a une cohorte d'adorateurs, mais a ce jour reste cantonné a une scène et un public averti. N'insultons pas l'avenir, et voyons ce que vont donner les prochaines années. Quoi qu'il en soit, des artistes comme Scarlxrd sont importants car ils sont le reflet des temps troublés que nous traversons.
Nergrisen fait partie des artistes que j'ai pu découvrir sur soundcloud, devenu le laboratoire de ce que l'on nomme le "soundcloud rap" et regroupe des artistes aussi divers que variés, depuis les junkies au syrup du cloud rap en passant par les suicidaires de l'emo rap. Nergrisen, c'est Richard, jeune homme venu de Russie et vivant aujourd'hui en Espagne, et qui pousse le concept de trap metal dans ses retranchements avec sa death trap, soit une version extrême du genre, mixant bruits industriels, ambiances sordides, influences venues du death metal et du black metal et trap. J'ai déjà publié une interview de Richard dans ces pages, dont je vous remets le lien ici : https://www.webzinelescribedurock.com/2019/05/interview-nergrisen-trap-metal.html
Petite chronique de son unique album à ce jour, le très noir Arisen Energy, paru en 2019 et disponible uniquement en dématerialisé (c'est une autre particularité de cette scène : peu de sorties en physique, que ce soit pour des raisons financières ou par choix).
Imaginez un instant un mix de Nine Inch Nails période The Downward Spiral, le Burzum de Dunkelheit, des passages de Morbid Angel, du Dungeon Synth, tout cela passé au shaker de la trap ? Du mal a imaginer ? Ok, le plus simple alors c'est encore d'écouter :
C'est bon ? vous voyez mieux où je veux en venir ? Nergrisen n'est pas toujours violent. Parfois, a la manière de Ghostemane, il distille une ambiance sulfureuse et noire comme la suie. Mais une noirceur foncièrement urbaine, née dans les quartiers insalubres. Ici, contrairement au black metal ou au death metal satanique, le démon n'est pas une énième version du dieu Pan planqué dans sa forêt obscure. Non, ici, tout est béton et crasse, pauvreté et violence désespérée.
Plus extrême et underground que Scarlxrd et Ghostemane, le son de Nergrisen reste ancré dans l'ombre, et ne conquiert que des aficionados de musiques dangereuses. Lorqu'on entend l'album récemment publié par les biélorusses de Mora Prokaza (voir plus loin), on sent bien qu'ils ont écouté ce genre de trucs pour se détacher du black metal un brin générique de leurs débuts.
ELKK
BLACK METAL TRAP
Blackened Electronica ? Black Metal trap ? Elkk, comme beaucoup d'artistes issus du "soundcloud rap" se joue des étiquettes comme d'une guigne. Sa trap électronique est déchirée par des atmosphères lugubres et des riffs en trémolo venus du black metal. Un black metal atmosphérique codéiné qui batifole avec la trap pour créer une ambiance de noirceur urbaine du meilleur effet.
Parfois le beat est si lourd et lent qu'on pense a du funeral doom mélodique, un peu comme si Ahab avait pris tellement de syrup qu'il serait tombé dans les atmosphères enfumées de la trap du sud des USA. Un peu comme si Hvitserk Lothbrok, avec trop de champignons dans la gueule et de bière, s'était mis a groover.
Découvrir l'univers d'Elkk, s'est s'assurer une expérience inédite, futuriste et à la fois ancrée dans les forêts sombres antédiluviennes.
Elkk pousse le concept de l'association contre-nature du black metal et de la trap un poil plus loin que Ghostemane, car, même s'il est issu du rap, il porte en lui davantage les traces du metal noir dans sa musique.
Comment, quand on est un groupe de black metal biélorusse plutôt classique, sortir du lot des sorties infinies étiquetées black metal (avec tellement de trucs pas dignes au milieu) ? Sans doute pas en continuant a faire du black metal comme pas mal d'autres l'ont fait avant...Mora Prokaza, avec cet album "ovni" nommé By Chance , a répondu a la question : en sortant des sentiers battus (et rebattus !)
Premier indice que l'on est face a un disque qui apporte quelque chose de nouveau : les premières écoutes sont déroutantes. Ce mélange hétérodoxe de trap, de black metal, d'éléments culturels biélorusses et d'une certaine théâtralité perturbe ! Et puis, au fur et à mesure, comme avec d'autres cinglés de qualité comme Solefald, on rentre bien dans le délire et on se met a headbanguer comme un sauvage sur les riffs maladifs de WIMG ou I'm not yours. La voix de ghoule rappe des couplets incompréhensibles et on s'en fout, l'atmosphère est là et bien là ! Nous sommes en présence d'un disque qui pourrait éveiller des vocations. Surtout que, d'habitude, ce sont des artistes plutôt issus du rap, comme Ghostemane ou Nergrisen et Elkk qui viennent ajouter des éléments black dans leur trap alors que là c'est le contraire : de purs blackeux qui trouvent un intérêt aux grooves sordides de la trap. Mais il ne faut pas réduire Mora Prokaza a ce mélange : les parties d'accordéons ou instruments à vents, les choeurs de hooligans viennent aussi participer a la fête.
Je ne serai pas étonné que Mora Prokaza fassent des petits, et donnent envie a d'autres de se lancer dans l'aventure. Après tout, si le black metal a un quelconque intérêt en 2020 ce n'est pas en singeant (mal) les pionniers, comme trop de jeunes groupes le font, ce sera uniquement en faisant avancer le schmilblick, quitte a délaisser cette étiquette black metal parfois trop restrictive. A ranger à côté de vos albums de Griiim dans la partie chasse aux trésors de votre discothèque.
By Chance pourrait bien être un des disques qui compte quand nous ferons le bilan de cette drôle d'année. Un disque qui va de l'avant, qui cherche, qui fouille, une aventure artistique passionnante. A suivre !
URATSAKIDOGI
FROM RUSSIA WITH F***
Mais que se cache t'il derrière le "black hop" d'Uratsakidogi ?
Ayant pêché le nom du groupe dans un animé très hard (hentai) des années 90, cette bande de russes fous balancent, non sans humour, leurs hymnes de hip hop teinté d'esprit black metal et de gaudriole depuis leur fief de Moscou. Quand on voit leur dégaine improbable (corpsepaint et casquettes de rappeurs) on pense immanquablement aux empereurs des Juggalos, j'ai nommé Insane Clown Posse et leur rap horrorcore ayant connu un certain succès a la fin du 20ème siècle. Musicalement, l'album Black Hop, sorti en juin de cette année funeste donne à entendre une fusion de rap boom bap façon 90's et de riffs en trémolo façon Mayhem, surplombés par le flow acide et rauque des tchatcheurs. Leurs clips sont hautement rigolos et nous montrent bien que, bien que sans doute sincères, les russes savent aussi rires d'eux-mêmes.
Au fur et à mesure que l'on découvre le groupe, on s'aperçoit que ces derniers vont jusqu'à partager la scène avec les grands du metal extrême (exemple le festival Metal Over Russia programmé en 2021 où ils partagent l'affiche avec Moonspell ou Alcest et Rotting Christ). Loin de n'être qu'une anecdote, le groupe existe depuis 1997 et a sans doute été une influence majeure pour toute la scène black hop/black metal trap, dont Ghostemane et plus récemment Mora Prokaza leurs cousins de Biélorussie. L'album s'écoute avec grand plaisir et déploie ce truc très solennel et majestueux assez typique des groupes des pays de l'est. Les Run DMC du black hop !
jE REPRODUIS ICI L'INTERVIEW QUE L'EXCELLENT VII A BIEN VOULU M'ACCORDER EN JANVIER DERNIER...ENCORE MERCI A LUI !
AUTHENTIC HIP HOP - INTERVIEW AVEC VII (FR/ENG)
C'est un honneur que de pouvoir échanger avec un artiste aussi intègre et talentueux que VII. Depuis plus vingt-cinq ans le gars construit, brique par brique, une carrière exemplaire dans un Rap qui a su rester Underground et pur...Découvrez comment ce fan de Death Metal, cette réponse française à Necro, Ill Bill, les Geto Boys ou le Wu Tang en est arrivé là...Une interview importante, pour un artiste qui ne l'est pas moins...LE SCRIBE
Merci VII d’accepter cette interview. Nous allons piocher dans l’ensemble de ta carrière commencée en 1995, mais commençons par le présent si tu veux bien. Ce nouveau titre, « Nosferatu », bien sombre, qui anticipe un nouvel album. Peux-tu nous en parler ?
J’ai voulu revenir avec un morceau, simple, classique et rentre dedans. Un titre qui correspondait à tout ce que j’avais pu faire au long de ma carrière. Le reste de l’album n’est pas dans cet esprit-là, il y a essentiellement des titres introspectifs, ça donne un opus à la fois très personnel et plus spontané que d’habitude.
Une de tes grandes forces est bien dans tes textes : à la fois très imagés et inspirés par l’horreur, et ancrés dans un réel que tu as bel et bien vécu. Comment écris-tu ? Que penses-tu des textes des rappeurs actuels ?
J’écris seul, je fais tourner un son dans un casque sans personne autour. J’ai besoin d’être concentré. Je puise mon inspiration essentiellement dans mes lectures et dans mon quotidien. En ce qui concerne les rappeurs actuels, je n’ai franchement aucune idée de ce qu’ils font. Plus les années passe moins j’écoute de rap. J’écoute quelques potes histoire de me tenir informé, m’arrive d’avoir un coup de cœur pour un album, mais ça devient rare.
À l’époque de « lettre morte » ton premier album tu as déboulé dans le game avec un style très horrorcore et violent. On sent des influences hors rap comme le Metal par exemple. Qu’écoutes-tu comme Metal ou Rock ? Si je te dis qu’à l’époque je pensais aussi à Necro ou Ill Bill ça te surprend ?
Je n’écoute absolument pas de rock, j’ai principalement écouté du Death Metal : Necrophagist, Dying Fetus, Atheist, Death… ce genre de truc ! Necro et Ill Bill on clairement était des influences majeurs pour moi, au même titre que les Geto Boys, Nas ou le Wu-Tang.
Encore une fois j’en reviens à tes textes : quelle est la part de vécu dans tes textes ?
Ça dépend. Parfois il n’y a pas la moindre part de vécue dans mes textes, parfois il s’agit de choses personnelles qui me sont réellement arrivé, j’essaie de ne pas mélanger le fictif et les événements plausibles. En général quand ça reste réaliste il s’agit de situation vécue.
À l’époque tu kiffais Booba, non ?
À l’époque où j’ai sorti mon premier album (2007), Booba c’été vraiment pas ce que j’écoutais. Par contre quand j’étais gamin, à l’époque de Time Bomb, lui et Ali faisaient clairement partie des meilleurs. Des titres comme Le crime paie ou Les vrais savent, c’été vraiment Dark et rugueux, j’adorais. Donc jusqu’à son album Temps mort oui ça a été une influence.
« Les Jardins Macabres » ton deuxième album est encore plus noir que le premier. Tu t’adresses à qui dans « je veux te voir te faire péter la cervelle » ?
À tous les gens que je détestais à l’époque, c’est-à-dire quasiment tout le monde.
Quels artistes récents dans le rap ou la trap trouvent grâce à tes yeux ?
Je n’écoute pas de trap et le dernier album de rap qui m’est marqué c’est l’album de Masa Ace & Marco Polo sorti en 2018. J’adore ce genre d’ambiance. En rap français ça a été l’album Livre d’Or d’YWill, vraiment lourd.
Tu fais beaucoup de name dropping avec des tueurs en série (Ted Bundy, Henry Lee Lucas...) et tu décris des scènes qui peuvent rappeler leurs méfaits. Que représentent ces personnes pour toi ?
Ça aide à faire des punch-lines percutantes, rien d’autre. Je ne comprends pas qu’on puisse être fan ou qu’on veuille épouser ce style de type. J’aime l’histoire de Charles Manson, car les histoires de manipulation et de contrôle des esprits m’intéressent, mais je n’en fais pas une icône. Beaucoup de gens viennent spécifiquement me parler de tueur en série, mais ce n’est pas un sujet qui me passionne.
En 2014 quand tu fais un titre comme « pestilence » on sent des influences ésotériques et mystiques. As-tu des convictions personnelles en ce domaine ou c’est juste du décorum ?
Non je suis quelqu’un de cartésien, terre à terre, je ne crois pas en ces choses-là. Ça fait partie d’un ensemble de code qui m’a aidé à créer des concepts artistiques, mais rien de plus.
Tes 20 albums préférés de tous les temps, dans tous les styles ?
1. Nas : Illmatic
2. Akhenaton : Métèque et Mat
3. Necrophagist: Epitaph
4. John Coltrane Love Supreme
5. NTM : 1993… j’appuie sur la gâchette
6. Death : Symbolic
7. GZA : Liquid Swords
8. Miles Davies Kind Of Blue
9. Necro : Gory Days
10. Metallica : Master Of Puppets
11. Wu-Tang Clan : Enter The Wu-Tang
12. Ornette Coleman : The Shape Of Jazz To Come
13. Tribe Called Quest : Midnight Marauders
14. Death : Human
15. Dying Fetus : Destroy The Opposition
16. Fat Joe : Jealous One’s Envy
17. Megadeth : Rust In Peace
18. Scarface : The Diary
19. Nile : Annihilation Of The Wicked
20. Cecil Taylor : Conquistador
Qu’aimerais-tu qu’on dise de VII ?
Qu’il est resté authentique jusqu’au bout, sans compromis, fidèle à sa vision du monde !
Espace libre : ajoute ce que tu veux, y compris un couplet ou deux !
Alors pas de couplet, mais un simple message destiné à ceux qui me soutiennent depuis tant d’années. Je remercie rarement les gens qui m’écoutent, car après tout ça fait partie d’un échange de bon procédé, je leur consacre une grande partie de mon temps et il me restent fidèle en contrepartie, mais néanmoins faut bien reconnaître que si je vis de mon écriture (musique et littérature) depuis plus d’une dizaine d’années c’est uniquement grâce à eux. Les médias, les acteurs du milieu, les autres rappeurs, ils ne font pas référence à mon travail, donc on fonctionne en circuit fermé et si je suis là depuis tout ce temps c’est que ça marche bien ! Donc un gros big-up à eux !
Merci VII
VIRUS
LE BONHEUR EST DANS LE RAYON DU FOND
Le rap français mérite qu'on lui donne une nouvelle chance. Il mérite de ne pas être réduit a l'idiocratie musicale de St Jul et tous ces chanteurs de variétés a minettes déguisés en Urban Pop. Depuis toujours des rappers ont utilisé la richesse de notre langue pour déployer un rap qui fonctionne hors des sentiers battus et loin des radars du showbiz. VII, que nous venons d'évoquer, fait partie de ceux-là, qui, depuis Akhenaton, ont décidé de ne pas prendre leurs auditeurs pour des cons. On pourrait citer Oxmo Puccino et son oeuvre raffinée, bien sûr. Ici j'ai choisi d'évoquer ce poète de l'under qu'est Virus, qui, avec ses adaptations de Jehan-Rictus réalisées avec le grand Jean-Claude Dreyfus, nous rappelle a toutes fins utiles que le français est la langue de la poésie, et que le beat ne lui fait pas de mal.
L'album Les Solliloques du Pauvre mérite toute votre attention : que vous soyez ou non amateurs de rap, vous ne pourrez pas nier la beauté du résultat.
INTERVIEW VINDSVAL OCT 2019 "Je ne peux pas me contenter du hasard ou du non-sens, mon esprit refuse complètement cette idée dont beaucoup semblent aujourd'hui s’accommoder" (Vindsval) William Sheller chante qu'il veut être un homme heureux...je ne sais pas si c'est possible, mais en tout cas, pour moi, avoir le privilège de cette interview est une des choses qui se rapprochent le plus du bonheur. C'est la deuxième fois que le maestro se confie a moi, et cette fois encore plus longuement. C'est sans doute son interview la plus intime, la plus personnelle, et, selon ses mots, probablement la dernière qu'il donnera, l'homme préférant la solitude du créateur. Une dernière fois donc, et ceci nous a permis d'aborder l'enfance de Vindsval, son rapport a l'art, a l'esthétique, au showbiz, la philosophie, la poésie, la lumière, l'histoire...et le black metal, bien sûr. Bref, sans doute la meilleure interview que j'ai eu l'oppor...
Olivier Déhenne Premières Fois Nouvelles 2019 L'Age d'Homme - Collection Contemporains Olivier Déhenne ? si, comme moi, vous possédez quelque bagage culturel en termes de musiques sombres et underground, vous devez connaître l'oeuvre d'Eros Necropsique, entité étrange et noire, dont les textes poétiques dévoilent depuis plusieurs décennies un romantisme macabre réunissant comme il se doit les pulsions de vie et de mort d'Eros et de Thanatos, conjugués dans un écrin musical gothique. Ce n'est pas d'Eros Necropsique que je vais ici vous entretenir, ni même d'ailleurs de musique, puisqu'il se trouve qu'Olivier Déhenne est également écrivain. Après un premier roman sous forme de journal intime - Les Miasmes de La Claustration - c'est ici sous la forme du recueil de nouvelles que la plume d'Olivier est venue se plonger dans le sang et les liquides corporels les plus divers. Cela va de soi, ces nouvelles ne sont pas destinées aux âmes sen...
Nicolas Claux : Put The Fun In Funeral, une/an interview avec/with Le Scribe Du Rock "Peuple de France, le gouvernement te ment. Si j’ai appris une chose dans les morgues, c’est que ton espérance de vie se raccourcit à vue d’œil. Cancers, AVC, diabète, et désormais virus de plus en plus virulent, ton compte à rebours est déclenché. Achète un Bundyldo avant qu’il ne soit trop tard" (Nicolas Claux) S'il est vrai que Nicolas Claux (ou Castelaux comme nom de plume selon les cas) a commencé sa carrière à la rubrique faits divers (profanations de sépultures, cannibalisme, utilisation du sang comme "drink" et finalement meutre) il a commencé une deuxième vie après des années d'incarcération. Se découvrant une passion assez logique pour le metier d'agent mortuaire, qu'il a pratiqué de nombreuses années, il est aujourd'hui directeur de collection chez Camion Noir (le pendant "macabre" du Camion Blanc), mais aussi patron du site de murderabilia...
WINTERMOON Cold Sky Rising 2023 Black Metal Epique Oui, "winter moon" est bien le titre d'un morceau d'Immortal, et cela n'est pas un hasard. Cet album aux tonalités glaciaires impose Wintermoon comme digne successeur de l'Immortal le plus épique et du Bathory de l'ère Blood, Fire, Death. Il serait pourtant trop simple de limiter la description de ce premier album (après deux Eps) à du name-dropping. J'avoue avoir été soufflé par la qualité des compostions de Cold Sky Rising ! Les neuf titres qui composent cet album sont le fruit inspiré du travail de Gryp, musicien accompli. Ainsi, loin du salmigondis infâme que peuvent générer certains groupes "underground" nous nous retrouvons ici face à un disque très abouti, porté par un black metal épique et majestueux, habité de riffs inspirés aux colorations heavy/black et créant une envie irrépressible de l'écouter encore et encore. Les soli aussi, chose rare de nos jours, nous entrainent et...
ATTENTION ! Groupe avec humour ! Quand j'ai décroché l'interview qui suit avec l'ami Albatard (le bassiste, vous savez, le mec qui accompagne les musiciens partout 😂 ) je n'avais qu'une inquiétude : qu'il déconne tellement qu'il ne réponde pas à mes questions. Alors, rassurez-vous, en ces jours gris, l'humour de l'ami est bien là, et ça fait vraiment du bien, mais il a eu la gentillesse de jouer vraiment le jeu de cette interview rétrospective où nous revenons en détail sur 20 ans de Gronibard ! Et puis ne vous inquiétez pas, on rendra aussi un bel hommage à Corbier...Et en plus il y a du scoop dans l'air, comme disent les journalisses, Gronibard attendraient un nouveau bébé !! Vous êtes devenus un des groupes les plus importants du grindcore en France, et les fondateurs d’un grind «rigolo » et potache, très axé sur les histoires de fesses. Pouvez-vous nous rappeler un peu les conditions de la naissance du groupe et pourquoi ...
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