BLOD
MARA
2024 TALHEIM RECORDS
BLACKENED SLUDGE DOOM METAL
D'abord il y a l'objet. Un superbe digipack tout de nuances de gris et de noir fait, avec cette pochette superbe ou le Christ est représenté en femme - S'agit-il de Anna W. la vocaliste ? - là où le rouge exprimait encore le sang qui circule et donc la vie sur le précédent album Serpent. Ici tout n'est plus que deuil, noirs et blancs plus ou moins profonds, un décorum des plus black metal qui se trouve complété par les photos intérieures, faisant appel à l'imagerie d'un sombre paganisme, voire d'une sorcellerie diabolique. Car diabolique Blod l'est, c'est l'essence à laquelle le duo carbure. On le rappelle, Anna W. est accompagnée par Ulrich W. (membre de Otargos, ancien de Regarde Les Hommes Tomber), bref, un habitué des atmosphères lugubres.
Côté musique, voici ce que je disais du premier album du duo en 2020 :
"D'un point de vue musical, le duo produit un assemblage pesant et noirâtre fait d'une base Doom/Sludge particulièrement heavy et d'une noirceur directement issue du Black Metal. Mais cet étalage d'étiquettes est loin de rendre justice aux qualités de la musique de Blod. C'est en effet l'originalité qui prime ici, tant le mix de la voix d'Anna, mélancolique et plutôt proche du Rock (voire du Grunge à la Nirvana/Hole par moments, ce qui de ma part est un sacré compliment, et parfois on pense aussi à une Chelsea Wolfe dans ses moments les plus Metal) va ajouter un supplément d'âme à la musique du groupe, alors qu'une énième voix growlée/hurlée n'aurait fait que créer une créature lourde et malsaine de plus."
Je pourrais aisément reprendre une longue partie de ce passage qui me semble toujours exact concernant Mara, ce troisième album en quatre ans -eh oui, déjà - Anna chante toujours aussi bien, alternant voix claire mélodieuse et mélancolique et hurlements déchirés sur un mur de guitares spectorien faisant couler le plomb dans nos conduits auditifs. De plomb il est largement question ici, avec ces titres lents et incroyablement lourds, un doom metal satanique qui se noie dans la boue sludgienne en portant les plus beaux apparats du black metal.
Alors vous pourrez me dire, à quoi bon se plonger dans un bain souffreteux reniflant à mille kilomètres la présence du grand bouc alors que nous vivons une époque déjà suffisamment noire comme cela !
Je peux entendre cela, mais tout m'empêche de ne pas retourner me salir l'âme à l'écoute de ce Mara, sorte de The Gathering sous acides pris en flagrant délit de - black - sabbat, mêlé avec une Courtney Love ayant vendu ce qui lui reste d'âme à l'infâme Beel Ze Buub.
Il en est ainsi de nous, esclaves de l'art des ténèbres, pour toujours accros à la vilénie de ces sonorités toutes de marasme.
Oui vous pouvez être une brave fille, un brave mec dans la vie et avoir besoin de votre dose de poison mortifère pour tenir le coup. Vous pouvez même être porteur de valeurs positives et pour autant vous gargariser de ce bain immonde dans la fange la plus bubonique.
Il en va ainsi de nous, il en va ainsi de Blod, qui, avec ce troisième album, nous enfonce le crâne dans les abysses les plus profondes, et le pire c'est qu'on en redemande...
Pierre Avril
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